Le premier cheval en Nouvelle-France : un cadeau à M. de Montmagny

Le premier cheval en Nouvelle-France : un cadeau à M. de Montmagny

Le 16 juillet 2015 était fêté le 350e anniversaire de l’arrivée des premiers chevaux en Nouvelle-France; il s’agissait là des premiers spécimens ayant engendré une lignée. En effet, le premier cheval à avoir posé un sabot en Nouvelle-France est celui qui a été offert en cadeau au Gouverneur de Montmagny, en 1647. C’est celui-là même le premier équidé au pays… Malheureusement, il était tout seul…

Le premier cheval en Nouvelle-France

C’est grâce aux Jésuites et à leur journal que l’on sait que le premier cheval a débarqué en Nouvelle-France le 20 juin 1647. Ce cheval était un cadeau de la Compagnie des Habitants au gouverneur de Montmagny, car celle-ci jugeait qu’un chevalier se devait d’avoir une monture (Séguin, 1951).

Le 20 de juin arriva le 1er vaisseau à Tadousak et la nouvelle en fut apportée ici le 23, veille de St-Jean. Ce même vaisseau apporta le 1er cheval, dont les habitants faisaient présent à M. le gouverneur.

Roy, 1930

En effet, Jacques Charles Huault de Montmagny qui devient, le 12 juin 1636, le premier gouverneur et lieutenant général de la Nouvelle-France. Il est également Chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Il est donc incongru qu’il n’ait pas de monture.

Montmagny est remplacé dans ses fonctions en 1648 et rentre en France en septembre de cette année-là. Qu’est alors devenu son cheval ? On ne le sait pas. Aucune mention n’en est faite dans l’inventaire des animaux de la colonie par Pierre Boucher en 1663. Pourtant, Boucher va même jusqu’à mentionner des rats, après les vaches, les bœufs, les moutons, les cochons, les chats et les chiens (Séguin, 1951).

Le premier cheptel en Nouvelle-France

Le premier troupeau constitué de 12 chevaux arrive en juillet 1665. En fait, sur les 20 animaux expédiés, 8 sont morts pendant la traversée (Séguin, 1951). Notons qu’ils arrivent en même temps que le régiment de Carignan, ainsi que 8 filles du Roi, précise le Journal des Jésuites (Roy, 1930).

Le reste du Régiment de Carignan, à quelques Compagnies près, arriva avec M. de Salières, qui en étoit Colonel, sur une Escadre, qui portoit aussi MM de Courcelle & Talon, un grand nombre de Famille, quantité d’Artisans, des Engagés, les premiers Chevaux, qu’on ait vus en Canada, des Bœufs, des Moutons, en un mot, une Colonie plus Considérable que Celle qu’on venoit renforcer.

Charlevoix, dans Séguin 1951, p. 8

Les Jésuites nous apprennent également, dans la Relation de 1665, que les Autochtones appelaient ces chevaux les Orignaux de France :

Le seizième de Juillet, (1665) arriva le navire du Havre, portant des chevaux, dont le Roy a dessein de fournir ce pais. Nos Sauvages, qui n’en avoient jamais veû, les admiroient, s’estonnans que les Orignaux de France (c’est ainsi qu’ils les appellent), soient si traitables, et si souples à toutes les volontez de l’homme.

Dans Séguin, 1951

D’autres chevaux et juments sont envoyés dans la colonie entre 1667 et 1670. La sœur Marie de l’Incarnation se réjouit d’ailleurs d’avoir reçu, en 1667, 2 juments et un étalon pour les labours (Séguin, 1951).

L’année 1670, le Roi envoya pareillement un étalon & douze juments, & les fit distribuer aux gentilshommes du pays, les plus zélés pour la culture des terres : une jument à M. Talon, deux juments à M. de Chambly avec un étalon, une à M. de Sorel, une à M. de Contrecœur, une à M. de Saint-Ours, une à M. de Varenne, deux juments à M. de Lachesnaye, une à M. de Latouche, une à M. de Repentigny, enfin la douzième à M. le Ber.

Sulpicien Faillon, dans Séguin, 1951 p. 9

Ceux qui recevaient un cheval devaient le nourrir pendant 3 ans. Si, par malheur, cet animal venait à mourir, celui à qui il avait été donné devait en payer la somme de 200 livres au receveur du Roi. Sinon, au bout de trois ans, le cheval pouvait être vendu. En ce qui concerne les poulains qui naissaient dans la colonie, les « propriétaires » pouvaient les vendre au bout de trois ans, à la condition de donner au receveur du Roi un poulain pour chaque cheval reçu ou la somme de100 livres. Ces poulains donnés au roi sont distribués à d’autres particuliers, dès l’âge de trois ans, aux mêmes conditions (Roy, 1930).

Vers 1671, l’intendant Talon mentionne au roi que les envois de chevaux ne sont plus nécessaires. En effet, les juments s’avèrent être suffisamment fertiles pour que le cheptel s’accroisse rapidement et qu’il couvre les besoins de la population (Rowe & Lambert, s.d.). Ces animaux se multiplient tellement que l’intendant Raudot (intendant de 1705 à 1711) doit interdire aux habitants de Montréal de détenir plus de deux chevaux ou juments et un poulain chacun (Roy, 1930).

On savait que 80 chevaux avaient, à eux seuls, constitué la race en se multipliant dans la vallée du Saint-Laurent et qu’ils venaient de Normandie et de Bretagne. L’histoire peut maintenant se confirmer scientifiquement grâce à une étude génétique exhaustive dirigée par le Dr Gus Cothrane, spécialiste au laboratoire équestre de l’Université A & M du Texas (…). (Lévesque, 2015)

 

Lévesque, 2015

En 1681, la colonie compte 77 mâles et 19 juments (Sylvestre, 2009). Au moment de la Conquête, il y a 14 000 spécimens. Quelques années plus tard, en 1784, on en trouve plus de 24 000 (Rowe & Lambert, s.d.).

Et les autres... chevaux

Si l’on omet que des chevaux préhistoriques y gambadaient bien avant l’arrivée des Européens, même s’ils avaient disparu depuis, on ne sait pour quelles raisons d’ailleurs (Bernier, 1984), ce sont les Européens qui ont débarqué les premiers chevaux en Amérique, à commencer par les Espagnols dès le deuxième voyage de Christophe Colomb. Les Espagnols ne cesseront d’amener des troupeaux pendant près de 300 ans. Les Anglais ne sont pas en reste avec des débarquements de chevaux anglais en Virginie entre 1607 et 1617. Les Hollandais, également, amènent quelques spécimens vers 1725 dans la Nouvelle-Angleterre qu’ils voulaient coloniser. Les Danois en apportent quelques-uns en 1629 dans le Delaware actuel (Bernier, 1984).

Le baron de Léry aurait amené dans ses cales des chevaux et des vaches qu’il aurait débarqués sur l’île de Sable en 1518. Du temps de Poutrincourt, en 1609 et jusqu’en 1616, des chevaux de race bretonne et normande sont apportés en Acadie (Bernier, 1984).

Conclusion

En 1634, d’après le père Lejeune, des ânes étaient présents dans la colonie. Mais, les chevaux ne semblaient pas encore être utiles en Nouvelle-France. Du moins, cela ne semblait pas une priorité d’en avoir. En outre, il y avait la crainte constante qu’ils puissent être abattus par les Iroquois et qu’il ne soit pas possible de les nourrir en hiver. Et puis, le voyage coutait excessivement cher (Séguin, 1951).

TRAVAUX CITÉS

Bernier, P. (1984). Histoire du cheval au Québec. Récupéré sur Colloque sur le cheval : En ligne

Lévesque, B. (2015). Le cheval canadien : une race pure, un cheval noble. Radio-Canada. Récupéré sur https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/726733/cheval-canadien-race-histoire

Rowe, S., & Lambert, G. (s.d.). Cheval Canadien, joyau du patrimoine agricole du Québec. Récupéré sur Encyclopédie du patrimoine culturel de l’Amérique française : http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-94/Cheval_Canadien,_joyau_du_patrimoine_agricole_du_Qu%C3%A9bec.html#.Xg-F1fxCdZU

Roy, P.-G. (1930). La ville de Québec sous le régime français. Québec : Archives du gouvernement de la province de Québec. Récupéré sur En ligne

Séguin, R.-L. (1951, Septembre). Le cheval et ses implications historiques dans l’Amérique française. (I. d. française, Éd.) Revue d’histoire de l’Amérique française, 5(2), pp. 227-251. doi:https://doi.org/10.7202/801699ar

Sylvestre, P.-F. (2009, Juin 16). Premier cheval en Nouvelle-France. Récupéré sur L-express.ca : https://l-express.ca/premier-cheval-en-nouvelle-france/

Illustration : Fonds Jacques Viger (1813-1856). Album Souvenirs canadiens. Pièce BM099-1_1-230. Ville de Montréal. Section des Archives. En ligne.

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